MAELSTRÖM
Client:
MAB
Year:
2021
J'ai rencontré Marie Vauzelle comme comédienne dans la pièce MCCM de Gildas Milin.
Dans son spectacle, je suis acteur au plateau en compagnie de Louise Arcangioli, je mixe en direct les morceaux de musiques électroniques que j'ai composé, je joue également du trombone, du clavier, de la basse et du soubassophone.
"Le texte de Fabrice Melquiot interroge avec poésie l’adolescence d’aujourd’hui. Au coin d’une rue, au coeur d’une grande ville indifférente, Vera laisse éclater sa tristesse, sa colère et son désir de vivre. Elle est née sourde et a été appareillée à l'âge de 2 ans. Elle traverse maintenant l'adolescence et ses douleurs dans un monde d'entendant auquel elle adresse un cri poétique contre la fabrique des identités fixes.
Projections vidéo, jeux de lumière et dispositif sonore plongent les spectateurs dans une expérience sensorielle. Ils voyagent dans un espace mental, entre réalité, souvenirs et imaginaire.
Incarnée par de jeunes interprètes, cette parole fulgurante exprime les tourments et les espoirs d’adolescents qui voudraient pouvoir vivre ensemble et rester singuliers."
La création musicale de Maelström a été une de mes premières. Un des éléments qui m'a attiré tout de suite a été le travail de recherche sur le spectre de la surdité à mener en amont du projet. Quelle perception musicale peut-on rendre possible au delà du son ? J'ai commencé mes recherches sur la psychoacoustique pour tenter de comprendre comment notre oreille se forme, s'adapte et se formate peu à peu au contact de l'univers sonore qui nous entoure depuis la naissance, et ce que cela impliquait dans le cadre d'un appareillage.
Cependant Maelström est aussi un thriller intérieur captivant aux personnages haut en couleur. Ces recherches préliminaires on été le matériau de base à la création d'une musique qui nous ancre dans la densité des instants et nous fais voyager avec Vera et ses pensées.
La rencontre et le travail en binôme avec Josef Amerveil, incomparable créateur sonore, a grandement influencé ma méthodologie de composition et je m'inspire aujourd'hui de sa précision et de sa délicatesse à chaque nouvelle création. Il décrit ainsi le travail fait sur Maelström :
"La demande de la metteuse en scène était de rendre compte d’une part du type d’écoute que pouvait avoir Vera avec le désir d’immerger le spectateur dans cet environnement et une volonté de moments très cinématographiques.
Dans un premier temps j’ai donc effectué une série assez conséquentes de prises de sons, dans un milieu exclusivement urbain, hormis une séquence en bord de mer auxquels s’ajoutent des intérieurs (concernant la séquence de l’hôpital ou de la déambulation en taxi)
Ensuite j’ai recrée à partir de ce matériau un tissu acoustique scandé par des punctums métalliques, des allitérations sonores etc… brefs une série d’éclats qui parasitent notre écoute habituelle .
Enfin j’ai retravaillé l’ensemble de cette première couche en filtrant et en sculptant essentiellement les fréquences perceptibles à certains stades de l’apprentissage évolutif de l’écoute chez une personne appareillée.
Les séquences « véristes » pour leur part sont traitées du point de vue cinématographiques avec un travail plus axé sur la perspective, le mouvement et l ‘espace.
Cela a donné une base que j’ai ensuite déployée avec des éléments disparates sur six points de diffusions pour obtenir un effet de relief sonore.
Parallèlement, j’ai enregistré la voix de la comédienne pour construire des morceaux rythmiques et composer des scansions musicales de consonnes et voyelles en travaillant sur l’aspect interne d’une « voix de sourde » c’est a dire un travaillant sur la décompression et la surabondance de souffle lors de l’émission vocale.
De la même façon j’ai créé une palette d’acouphènes sonores et de larsens qui viennent ponctuer différentes tensions au plateau, ainsi qu’une grandes quantités de fréquences basses spécifiques qui sont dédiées à un caisson de basse supplémentaire au centre du plateau ou se déploient les ondes perceptibles immédiatement par le corps du personnage.
Enfin se rajoute un travail sur des ondes sinusoïdales qui mettent en vibration l’autre élément de la scénographie, un échafaudage de chantier.
Ma composition est faite à partir de matériaux sonores et « musicaux » que j’ai créé ( à l’exception d’un clignotant dans le taxi que je n’avais pas pu enregistrer)"